On ne peut souhaiter qu'une meilleure année à tous les hyménoptères de la planète, après une sucession de décennies aussi calamiteuses ! Et pas seulement pour notre abeille mellifère. Une étude américaine récente confirme le déclin spectaculaire des bourdons aux États-Unis[1].
Après trois ans d’analyses de 73 000 données provenant de différents muséums, sur les changements d’aire de distribution et de structure génétique des populations de huit espèces de bourdons, un groupe de chercheurs de l’Illinois et de l’Utah vient de montrer que l’abondance relative pour quatre de ces espèces a plongé dramatiquement, jusqu’à 96 %, et que leurs aires de répartition s’est contractées de 23 à 87 % au cours des vingt dernières années.
Si une trop faible diversité génétique pourrait être en cause, les auteurs de l'étude notent également une corrélation troublante entre ces populations déclinantes et leurs niveaux d’infection par le micro-champignon Nosema bombi. Un protozoaire dangereux pour les bourdons qui aurait pu s'inviter sur le sol américain à la faveur des importations de colonies d'abeilles ou de bourdons en provenance du Vieux continent ou de certaines locations de colonies à des cultivateurs européens au début des années 90.
Les quatre espèces en déclin sont, à l’Ouest des États-Unis, Bombus occidentalis (A) et à l’Est B. pensylvanicus (D), B. affinis (G) et B. terricola (H). Les espèces aux abondances stables sont, à l’Ouest, B. bifarius (B) et B. vosnesenskii (C), et à l’Est B. bimaculatus (E), et B. impatiens (F). © D. Ditchburn, L. Solter, M. Layne, T.Wilson, J. Whitfield, J. Lucier et J. James-Heinz.
Sur notre continent, les bourdons du Vieux continent ne sont pas mieux lotis. Un recensement important, publié en 2007 et passé largement inaperçu[2], s'était intéressé aux changements de distribution de 60 espèces et sous-espèces de bourdons dans onze pays de l'Europe occidentale et centrale[3] depuis le début du xxe siècle. Et cette revue bibliographique était consternante : 80 % de ces taxons sont menacés dans au moins un pays de cette région d’Europe, 30 % sont vulnérables dans toute cette zone géographique et 4 taxons ont disparu dans les onze pays entre 1951 et 2000.
Or, le déclin de ces gros pollinisateurs se poursuit. En janvier 2009, un entomologiste et une écologue britanniques ont montré que 6 des 16 espèces de bourdons étudiés en Grande-Bretagne ont vu leurs populations et leurs aires de répartition également régresser[4]. L’une d’elle, Bombus subterraneus, aurait même disparu tandis que quatre autres espèces risquent fort de la rejoindre...
[1]Sydney A. Camerona et al. (2010) “Patterns of widespread decline in North American bumble bees”, PNAS, doi:10.1073. Pour lire cette étude, cliquez ici.
[2]Belgique, Pays-Bas, Luxembourg, Danemark, Allemagne, Suisse, Autriche, Tchéquie, Slovaquie, Hongrie et Pologne.
[3]Andrzej Kosior et al. (2007) “The decline of the bumble bees and cuckoo bees (Hymenoptera: Apidae: Bombini) of Western and Central Europe”, Oryx, 41,1.
[4]Paul H. Williams et Julie L. Osborne (2009) “Bumblebee vulnerability and conservation world-wide”, Apidologie, 40, 367–387.